Je suis Thierry Arnaud, éditorialiste à BFMTV, ex-correspondant à Washington et Londres, ancien chef du service politique de BFMTV et directeur de la rédaction de BFM Business. Crises géopolitiques, tensions économiques, recompositions du pouvoir… Chaque semaine, je vous propose de décrypter l’actualité internationale.

Zohran Mamdani, 33 ans, d’origine indienne, vient de terrasser l’ancien gouverneur Andrew Cuomo à l’élection primaire démocrate pour désigner le prochain candidat démocrate à la Mairie de New York. Getty Images via AFP

L’Amérique et ses deux gauches irréconciliables

“L’establishment démocrate s’accroche de manière suicidaire à un pouvoir qu’il ne détient plus. Nous avons fait le choix de ne pas évoluer, et si nous n’évoluons pas, nous marcherons vers l’extinction”
Amit Singh Bagga, stratégiste démocrate et ancien élu local à New York

Donald Trump devrait être un président vulnérable. Il n’est pas populaire: les Américains sont sensiblement plus nombreux à désapprouver son action qu’à la juger positive - tous les sondages récents s’accordent sur ce point. Son assise politique est fragile: la majorité républicaine au Congrès est modeste, de trois sièges au Sénat (sur 100), de deux sièges à la Chambre des Représentants (sur 435). Le bilan économique de ses premiers mois n’est pas éblouissant, conséquence, selon de nombreux économistes, du penchant du président pour la guerre commerciale. La croissance ralentit - elle est attendue au mieux à 1,8% en 2025 contre 2,8% l’an dernier. L’inflation reste supérieure à 3%. Les créations d’emploi ont marqué le pas en début d’année. Quant à la loi budgétaire en cours d’examen au Congrès, la fameuse “Big Beautiful Bill” tant vantée par le président américain, 49% des Américains pensent qu’elle aura un impact négatif sur leurs finances familiales. Seuls 23% sont d’un avis inverse, selon une synthèse des sondages réalisée par CNN. La promesse d’une paix en Ukraine n’a pas été tenue, et le bilan comme les conséquences de frappes sur les installations nucléaires Iraniennes demeurent incertains. Il reste un sujet sur lequel l’évolution est spectaculaire, et conforme à la promesse électorale: l’immigration, ou du moins le durcissement destiné à dissuader les candidats à l’immigration clandestine depuis la frontière mexicaine, où les interpellations ont chuté de 95%. Les expulsions, en revanche, tardent à décoller et sont plus controversées. 

Sommet de l’impuissance

Au total, dans un pays en campagne électorale permanente, les démocrates pourraient, devraient même nourrir de sérieux espoirs de renverser la tendance et d’imposer une cohabitation au 47^e président des États-Unis à l’issue des elections de mi-mandat de novembre 2026. Or, pour l’instant au moins, cette ambition semble totalement hors de portée. Sondage après sondage, la sonnette d’alarme retentit depuis des mois, et de plus en plus fort. Les Américains ne sont plus que 27% à avoir une opinion positive du parti démocrate, annonçait NBC News en mars dernier - il s’agit du chiffre le plus bas depuis 1990, lorsque le média américain a publié cette enquête pour la première fois. Pour 78% des Américains et 71% des électeurs démocrates, le parti est inefficace dans son opposition à Donald Trump, selon une enquête d’opinion, publiée début juin par CBS News et YouGov.

Une étude minutieuse menée par le New York Times montre comment à chacune de ses trois campagnes présidentielles, y compris lors de l’élection perdue de 2020, Donald Trump n’a cessé d’étendre la marée républicaine pour faire de son parti, de très loin, la force politique dominante au sein des classes populaires et des moins éduqués. Le parti démocrate, à l’inverse, n’a cessé de rétrécir sa base électorale, désormais presque totalement cantonnée aux plus aisés et aux diplômés de l’enseignement supérieur. “L’establishment démocrate s’accroche de manière suicidaire à un pouvoir qu’il ne détient plus. Nous avons fait le choix de ne pas évoluer, et si nous n’évoluons pas, nous marcherons vers l’extinction”, résumait récemment Amit Singh Bagga, stratégiste démocrate et ancien élu local à New York, dans les colonnes du Guardian.  

Le dernier héritier de Bernie Sanders

Voilà comment Zohran Mamdani, un jeune socialiste (il se revendique comme tel) de 33 ans d’origine indienne, vient de terrasser l’ancien gouverneur Andrew Cuomo à l’élection primaire pour désigner le prochain candidat démocrate à la Mairie de New York. Il défend l’encadrement des loyers, les impôts sur les plus riches, le SMIC à 30 dollars de l’heure, des épiceries aux capitaux publics, un budget réduit pour la police et même “la mondialisation de l’intifada”. Il est la dernière incarnation du courant déjà porté par Bernie Sanders ou Alexandria Ocasio-Cortez. L’avenir du parti démocrate se trouve-t-il dans ce virage radical vers la gauche? Ou le creusement du fossé entre deux gauches irréconciliables continuera-t-il à faire les beaux jours de Donald Trump et de ceux qui lui succèderont ?

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Le chiffre

500 000

C’est le nombre de travailleurs étrangers autorisés à entrer en Italie entre 2026 et 2028 par le gouvernement italien- le chiffre était de 450 000 pour les trois années précédentes, Giorgia Meloni devenant ainsi la cheffe de gouvernement ayant permis le plus grand nombre d’entrées de travailleurs immigrés en Italie afin d’apporter “la main d’oeuvre indispensable au système économique national”.

La population totale en Italie était estimée à 59 millions de personnes en 2024, soit une baisse de près de 1,35 million en dix ans.

La lecture de la semaine

Iran Update, Institute for the Study of War, 29 juin 2025

Après les frappes américaines, des activités de reconstruction sur le site nucléaire de Fordo ont été identifiées grâce à des images satellite. Car, oui, l’Iran a déjà commencé la réparation de ses installations nucléaires. La république islamique entend restaurer son arsenal de dissuasion et envisage de reconstituer son armée de l’air avec l’achat d’avions de combat chinois. Ce que confirme cette étude très instructive de l’Institut de Washington.

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Thierry Arnaud